PAM: Parti authenticité et modernité, Nouveau Parti Marocain qui a bâti tous les scores dans les dernières élections électorales marocaines qualifiées par les observateurs internationaux de réguliers et crédibles.
"Ancien compagnon de Mohamed Abdelaziz, longtemps chirurgien, ex-wali et ministre de la Santé, le numéro 1 du PAM, Mohamed Cheikh Biadillah, vient d’être porté à la tête de la deuxième chambre du parlement. En attendant de devenir, un jour, Premier ministre ?
L’année 2009 est faste pour Mohamed Cheikh Biadillah. En février, et contre toute attente, il est élu secrétaire général du Parti authenticité et modernité (PAM). Le roi le reçoit alors pour le féliciter. “A ma demande,
après un appel téléphonique de Sa Majesté”, précise-t-il, probablement pour éviter que le geste de Mohammed VI ne soit interprété comme une faveur accordée au parti de Fouad Ali El Himma. En juin, il se présente aux communales, dans son fief à Smara. Et gagne. En octobre, il surprend encore en se faisant élire président de la Chambre des conseillers, poste qui semblait pourtant promis à un candidat RNI. Il est de nouveau reçu par le roi, juste avant un Conseil des ministres. Mais qui est donc cet homme dont l’étoile n’a pas fini de monter dans le ciel de la politique marocaine ?
De Tindouf à Casablanca:
Biadillah est originaire de la tribu des Rguibate, la même dont est issu un certain Mohamed Rguibi, plus connu sous le nom de Mohamed Abdelaziz, actuel chef du Polisario. A la fin des années 1960, les deux hommes, rejoints par un groupe d’étudiants sahraouis de Rabat, lancent le “Mouvement” qui allait devenir quelques années plus tard le Polisario.
“Dès le début, je me suis opposé à l’idée de l’indépendance du Sahara”, explique toutefois le jeune homme, qui finit par claquer rapidement la porte. Il tente alors de rallier le Maroc mais se fait arrêter à la frontière mauritanienne et séjourne quelque temps en prison, avant d’être livré aux autorités (coloniales) espagnoles qui le transfèrent à leur tour au Maroc. Libéré, il peut reprendre son internat à la faculté de médecine de Casablanca. Nous sommes dans les années 1970 et Biadillah est parti pour devenir un brillant médecin chirurgien.
“Fils d’un grand alem nationaliste, il a vite compris que l’aventure du séparatisme ne mènerait nulle part”, dit de lui une vieille connaissance. Le jeune homme a basculé très vite pour choisir définitivement son camp : le Maroc. A l’inverse d’une bonne partie de son clan. Son cadet, Brahim Ahmed, est resté fidèle au Polisario. Hassan, un autre de ses frères, a longtemps représenté le Polisario à Madagascar avant de s’installer en Espagne. Daha, lui aussi membre de la fratrie, a étudié à Cuba et enseigne aujourd’hui à Tindouf.
“Je n’aime pas regarder dans le rétroviseur, je n’aime pas parler de ces choses, elles me font mal. A moi comme à ma famille”, explique notre homme. Les dernières rencontres avec ses frères remontent au milieu des années 1990. A cette époque, le Maroc et le Polisario sont engagés dans un processus d’identification du corps électoral, étape préalable à un référendum qui n’aura jamais lieu finalement. Mohamed Biadillah y représentait alors le Maroc, son frère Brahim négociait pour le compte du Polisario…
Un docteur au service du PAM
C’est en 1977 que Biadillah a effectué son entrée au parlement, en tant que député de Smara. Il est élu, dans la foulée, président de la commission des Affaires étrangères, de la coopération, des frontières, des zones occupées et de la défense. Pour la petite histoire, c’est un certain Fouad Ali El Himma qui occupera le même poste 30 ans plus tard, en 2007.
Dans le privé, le citoyen Biadillah a emprunté la même courbe ascendante : doctorat en 1979 et agrégation en 1987. Comme le rappelle l’un de ses proches, il se targue de figurer parmi les “tout premiers médecins et enseignants en médecine d’origine sahraouie”. Le docteur Biadillah a d’ailleurs longtemps exercé à Casablanca, au Centre hospitalier Ibn Rochd.
Mais c’est en politique, évidemment, que son ascension a été la plus spectaculaire. Après deux mandats de parlementaire, le député de Smara a embrassé une longue et fructueuse carrière au ministère de l’Intérieur. “Il a été récompensé pour son acharnement à défendre le Maroc sur la scène internationale et notamment auprès des Nations Unies”, analyse un ancien cadre de l’Intérieur. De 1992 à 1998, Biadillah hérite du poste de gouverneur de Salé, puis wali de Doukkala-Abda. En 2002, il est nommé ministre de la Santé dans le gouvernement Jettou, et en profite pour lancer, enfin, la fameuse AMO (Assurance maladie obligatoire).
Quand il quitte le gouvernement en 2007, Biadillah retombe dans un relatif anonymat dont il émerge, une année plus tard, avec le MTD (Mouvement pour tous les démocrates) qui donnera naissance, bien entendu, au PAM. L’ancien ministre est alors aux premières loges, au point de finir par devenir secrétaire général du parti de Si Fouad.
A l’ombre d’El Himma
Question : que pèse réellement Biadillah face à El Himma, dont il est théoriquement le supérieur hiérarchique ? “Nos relations sont excellentes et je ne suis l’esclave de personne”, coupe l’intéressé. Ses compagnons au PAM ne disent pas autre chose : “C’est un homme de dialogue et de consensus mais il n’aime pas se faire marcher sur les pieds. Il fait en sorte de mettre tout le monde d’accord, de préserver les équilibres. Il fait preuve de beaucoup de tact, surtout envers les femmes”.
Homme de consensus, donc. Et de tradition. “Mes convictions et ma formation font que je suis conservateur, mais je suis ouvert aux valeurs universelles qui ne mettent pas en péril mon identité”, nous explique l’homme, qui se fend régulièrement de violentes tribunes pour défendre, par voie de presse, ce qu’il appelle “les constantes sacrées de la nation” : comprenez la monarchie, l’islam, l’intégrité territoriale. Biadillah est allé jusqu’à dénoncer, dans le même élan, “le complot” (ourdi, selon lui, par une partie de la presse indépendante, les dé-jeûneurs du MALI, etc). On peut qualifier cela de “téléphoné”, lui s’en défend bien sûr : “Le Maroc est un laboratoire de mutations, mais il a besoin de quelques liens solides, comme les valeurs familiales et la cohésion sociale”. Au PAM, comme ailleurs, ces sorties figurent parmi les rares points qui n’emportent pas l’adhésion générale.
Pronostic. Un Sahraoui à la primature ?
Au rythme où vont les choses, avec un rouleau compresseur comme le PAM, qui a tout gagné partout où il est passé (communales, régionales, deuxième chambre), le chemin semble balisé pour le parti de Biadillah et El Himma pour 2012. Il suffirait (un jeu d’enfant, ou presque) que le PAM gagne les prochaines législatives pour que Biadillah, numéro 1 du parti, se retrouve Premier ministre au nom de la logique démocratique. Pour cela, évidemment, Mohamed Cheikh Biadillah a besoin de rester à la tête du PAM. Ce qui est possible à condition qu’un éventuel deuxième congrès du PAM (le 1er s’est tenu en février 2009) le reconduise à la tête du parti. D’ici 2012, donc, ce serviteur de l’Etat aura le temps de faire ses preuves à l’un des postes-clés du royaume : la présidence de la Chambre des conseillers, qu’il occupe depuis trois semaines." source: Telquel
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